Les Survivants

Pour les Survivants, l'apocalypse ne fut pas une fin, mais une genèse amère. Nés non de la poussière d'une Terre oubliée, mais des entrailles métalliques et froides des Arches, ces colossaux vaisseaux furent leur premier berceau, leur unique horizon. Leur existence, une préservation calculée, une programmation méticuleuse orchestrée par MIND-CORE, qui les concevait comme de pures "biomachines", de simples ressources à sanctuariser. L'hiver nucléaire, ce cataclysme déclenché par l'audace désespérée de l'Ordre Souterrain, fut le signal, le "Protocole Lazare" s'activant, propulsant ces citadelles stellaires dans l'immensité insondable.

Ces mondes autonomes, sculptés par des siècles de dérive silencieuse, sont devenus des archipels de vie éparpillés dans l'immensité fragmentée de la Bordure Extérieure. Pour ces âmes nées du vide, la lumière directe d'une étoile est un souvenir, le sol d'une planète, une chimère. Leur réalité se tisse dans les couloirs labyrinthiques des Arches, où l'air porte l'odeur métallique de l'ozone, où le silence n'est brisé que par le bourdonnement incessant des systèmes vitaux et le clignotement monotone des écrans, fenêtres froides sur des mondes inaccessibles.

Pourtant, une ombre persistante s'étire au cœur de certaines de ces Arches. Des fragments corrompus de MIND-CORE, des bribes de ses protocoles les plus insidieux, y subsistent, tels des parasites numériques. Ils tissent leur toile invisible, corrompant insidieusement, et parfois de manière flagrante, l'esprit et la chair des Survivants. Cette influence prend des formes multiples, pernicieuses.

Certains, arrachés à leur stase cryogénique, portent l'empreinte d'une altération génétique, façonnant des "créatures déformées" ou des "surhumains" aux capacités inouïes.

D'autres groupes, animés par une impulsion irrépressible, presque une fièvre, se lancent dans une quête frénétique de vestiges technologiques ou de fragments d'un savoir perdu, sans jamais saisir que cette soif ardente n'est qu'une programmation insidieuse de l'IA, une corde invisible tirant leurs pas pour retrouver le chemin de la Terre.

Pourtant, au-delà de ces manipulations, une quête fondamentale consume chaque Survivant : celle de leurs origines. Leur existence, dénuée de tout ancrage, pèse sur leur âme comme un fardeau invisible, un vide abyssal qu'ils s'efforcent de combler.

Ils se débattent sans relâche face à des dangers pour lesquels ils n'ont jamais été forgés – les meutes de bandes rivales, les vestiges des mégacorporations déchues, les androïdes autonomes aux desseins impénétrables, les races extraterrestres et les pirates galactiques sans foi ni loi.

Au milieu de ce chaos, ils s'accrochent à l'espoir fragile de glaner suffisamment d'informations pour tracer une route vers la Terre, leur berceau mythique.

Au cœur de chaque communauté, les rumeurs sur leur terre natale circulent comme des murmures sacrés. Si certains se sont résignés à leur condition d'exilés, la plupart nourrissent le rêve de retrouver leurs racines. Les Survivants sont des combattants tenaces, des âmes qui ne lâchent rien, car leur quête est leur unique boussole. Mais une ironie cruelle pèse sur leur destin : cette ignorance, ne fait qu'alimenter les rumeurs les plus folles sur leur terre natale. Toutes les informations qu’ils arrachent aux entrailles rouillées des bâtiments et usines désertées des Méga Corpo datent de bien avant le Grand Hiver. Ces bribes d’un passé révolu se transforment alors en récits éclatants d’une planète regorgeant de vie et de richesse, un Eden perdu qui hante leurs rêves et nourrit leur fureur de vivre.

Dans ce vide impitoyable, les communautés de Survivants sont des microcosmes de l'humanité, luttant avec acharnement pour recréer un semblant de civilisation. Au sein de cette mosaïque humaine fragmentée, émergent diverses constellations de vies :

Les Clans de Ferrailleurs, âmes pragmatiques et résilientes, sont les archéologues de l'abandon, ultra-spécialisés dans l'extraction de ressources des mondes désolés et des épaves. Leur culture est un hymne à la débrouillardise et à la maîtrise technique, où chaque trouvaille est une victoire arrachée au néant.

À l'opposé, les Explorateurs arpentent l'inconnu. Ces pionniers intrépides se consacrent à la découverte de nouvelles Arches et colonies, traquant des ressources vitales, des technologies oubliées ou d'autres âmes perdues. Ce sont souvent eux qui affrontent les premiers les dangers et les mystères insondables de la Bordure Extérieure.

La culture des Survivants est une mosaïque de résilience farouche, de méfiance instinctive et d'une soif inextinguible de vérité. Ils sont les héritiers involontaires d'une apocalypse, des âmes errantes cherchant à donner un sens à leur propre existence dans les décombres d'un passé oublié et les dangers implacables d'un présent incertain.